jeudi 23 juin 2016

♪ 46 : Les Faux Hommes de Feu Transpercent les Diables Jumeaux

Faux-Jumeaux de Pierre-Yves Macé est un disque romantique expérimental, clair et paisible, rempli d'inattendu et d'étrangeté. C'est de la musique électro-acoustique, qui tend un peu vers le minimalisme, avec plein d'instruments différents (de la harpe, du vibraphone, du marimba, des gongs, des clarinettes, du piano, du carillon…).

Il y a quatre compositions en tout ; “Évocation” (dont le sujet, d'après le livret, est le temps et la mémoire) et “Faux-Jumeaux” confrontent jeux et reprises samplées de la même composition (une idée que j'avais déjà entendue ailleurs, notamment sur Nonextraneous Sounds de Mariel Roberts que j'aime beaucoup aussi). “Le Sentiment de la Nature aux Buttes-Chaumont”, inspiré par Le Paysan de Paris de Louis Aragon, comporte beaucoup de phonographies, ce qui est inattendu mais n'entame en rien la cohérence du disque.

Si ça vous tente, c'est un très beau disque ! J'en ai entendu parler ici : http://tzadikology.blogspot.fr/2014/05/pierre-yves-mace-faux-jumeaux.html



Il paraît que Betty Davis était une des premières artistes à jouer aussi ouvertement d'une séduction provocante et aggressive. On connaît trop souvent la variante racoleuse-publicitaire de ce genre d'attitude, où presque tout est dans l'image et les paroles, tellement peu dans le son… mais quand il y a du talent et du cœur derrière, c'est autre chose ! Son premier album est une demi-heure de funk / funk rock concis, ardent, où la tension ne se relâche pas d'un cheveu avant la dernière chanson et où Betty s'égosille la moitié du temps dans une attitude où le cool et le trash ne sont éloignés que d'un millimètre. J'ai encore beaucoup à découvrir dans le genre, mais j'espère en découvrir d'autres du même niveau !

À noter en passant — ça me fait bizarre de préciser ça — que l'artiste n'était pas que chanteuse, elle a écrit toutes ses chansons et s'est mise à la production aussi dès le disque suivant. Et pour l'anecdote, elle fut mariée à Miles Davis (c'est elle sur la pochette de Filles de Kilimanjaro) mais ça ne dura pas un an, Miles la trouvant trop jeune et trop impétueuse pour lui.





Vous aimez les musiques théâtrales et grandiloquentes qui partent dans tous les sens ? Les personnages de savants fous dans les histoires, le genre qui n'a que foutre de la raison ou de la retenue et se jette à corps perdu dans l'hubris le plus débridé en lançant des rires diaboliques, et qui gagne à la fin en plongeant le monde dans le chaos parce que c'est un génie malgré tout ? Naked City, Mr. Bungle, c'est votre came ? Le kitsch ne vous dérange pas ? Alors vous devriez écouter Devil Doll.

The Sacrilege of Fatal Arms est une piste-collage de 80 minutes de rock expérimental progressif symphonique gothique à personnalités multiples (rien qu'à voir la liste des genres à rallonge sur RYM, je me suis dit « il me faut ce truc »), un disque qui enchaîne tant de tensions et dénouements explosifs qu'on dirait la bande son de plusieurs films simultanés*, chantée en latin, anglais, allemand et français ; l'œuvre d'un mystérieux « Mr. Doctor », un Slovène Italien qui a recruté les membres de son projet Devil Doll sous l'annonce suivante : « Plus un homme est dominé par la raison, moins il a de chances d'atteindre la grandeur ; rares dans la plupart des domaines, et inexistants dans celui de l'art, sont ceux qui réussissent sans être dominés par l'illusion. » Ça va, il a le sens de la mise en scène, le mec !

Et il a du talent aussi. The Sacrilege of Fatal Arms, c'est un album d'artifices avant tout, ça sent la poudre aux yeux, parfois ça frise le ridicule… mais pour peu qu'on accroche, c'est quand même franchement bon.

Cela dit, j'ai écouté un autre disque du même projet, Dies Irae, et c'était sensiblement la même chose — ce qui m'a paru très décevant. Quand deux tours de magie reposent sur le même truc, le deuxième impressionne beaucoup moins. Je reste donc sur The Sacrilege of Fatal Arms.


* Il s'agit bien d'une bande originale, d'ailleurs ; d'un film du même nom, et écrit et réalisé par Mr. Doctor lui-même, bien sûr.





Je dois bien avouer que cet album de Meira Asher m'a fait peur au début… Une telle pochette et un tel titre, ça annonce tout de suite une musique torturée. Et effectivement, elle l'est. Mais c'est rare d'écouter une musique aussi douloureuse qui ait autant de facettes.

Présenté comme un « cauchemar », un « exorcisme » et un « opéra électronique » — industriel serait plus exact, vraiment, l'album n'est qu'en partie électronique —, Spears Into Hooks a des influences qui vont du power electronics au klezmer, des passages qui peuvent faire penser à Swans ou à Diamanda Galás, on ne sait jamais où l'artiste nous emmène. Neuf pistes et autant, si ce n'est davantage, de styles. “Weekend Away Break” avec sa rengaine d'avant-guerre donne la nausée. “Me Last Granny” avec sa voix presque seule est terrifiant.

Il s'agit aussi d'un album à thème politique, sur Israël dans les années 1990. Ça se traduit par de la tension, de la rancœur et de la violence partout. C'est un cauchemar polymorphe, captivant, je pensais l'écouter juste une fois pour voir mais j'y retourne plus souvent que je ne l'aurais imaginé.

https://meiraasher.bandcamp.com/album/spears-into-hooks-2
http://www.crammed.be/index.php?id=37&rel_id=129





The Fireman, c'est le projet ambient house de Youth (le bassiste de Killing Joke) et Paul McCartney. Rushes est un album doucement psychédélique, ensoleillé, avec beaucoup de guitares, quelques instruments exotiques… un album électronique qui utilise pas mal de sons acoustiques et n'en est que plus agréable, même si nappes et samples ne sont pas en reste. On ne dirait pas à l'écoute que les artistes viennent d'horizons qui n'ont rien à voir !

Les répétitions, très présentes, ne pèsent jamais. Et moi qui ai toujours trouvé le gros album d'ambient house (The Orb's Adventures Beyond the Ultraworld) décevant, trop long, avec des passages lourdingues… je dois dire que je lui préfère nettement cette alternative.

Leur album précédent était plus électronique, je ne l'ai pas beaucoup écouté encore. Je n'ai pas encore écouté le suivant, sorti dix ans après, paraît qu'il ressemble à Animal Collective (je ne sais pas encore si c'est une bonne chose).





Fallen Angel de Serafuse me fait penser à du verre. Une construction en verre, froide, brillante, complexe, avec des reflets irisés. C'est un album d'ambient techno avec quelques aspects arctic ambient, drone ou space ambient, un disque peu connu sorti chez Charrm, le label de :zoviet*france:. L'artiste (ou le groupe ?) n'a sorti que ce disque-là, de manière anonyme — aucune information nulle part, rien avant, rien après. L'artiste connu le plus proche serait Biosphere, je pense. Ça fait depuis des mois que j'écoute Fallen Angel et il m'est arrivé de regarder ma montre et de me dépêcher de rentrer chez moi pour avoir le temps de l'écouter en entier. Une perle cachée.

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