Je cherche un mot qui décrirait ce genre d'idéalisme qui nous fait voir dans certaines contrées exotiques des paradis terrestres, plus oniriques que réels. Avec cette pochette surréaliste, ces titres et surtout ces sons, c'est un peu à cela que me fait penser Through the Looking Glass de Midori Takada. Un album japonais des années 80 inspiré par des musiques africaines et asiatiques, quatre pistes comme autant de pièces d'un puzzle qui en comporterait davantage. Un exotisme ambient à la fois enchanteur et mélancolique sur la superbe “Mr. Henri Rousseau's Dream”, du Steve Reich tout craché sur “Crossing” ; “Trompe-l’Œil” est plus étrange avec ces flûtes et ce rythme un peu bancal qui intrigue. “Catastrophe Σ” est plus sombre et solennel, c'est une piste de nuit qui tombe, de monde-rêve qui prend fin.
L'album était épuisé depuis longtemps mais la réédition sort le mois prochain. Pas de pistes bonus, dommage ! Ses autres albums sont nettement moins connus, je n'ai pas pu les trouver encore.
L'album était épuisé depuis longtemps mais la réédition sort le mois prochain. Pas de pistes bonus, dommage ! Ses autres albums sont nettement moins connus, je n'ai pas pu les trouver encore.
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… Et donc là, le mec, déjà connu pour être prolifique, il sort un album à 100 € sur huit vinyles, comme ça, sans prévenir, sans même donner d'extraits à écouter. Et le coffret est épuisé dès sa sortie. « Bonsoir, je suis hype. » Ça sent tellement le coup marketing que ça donnerait même envie de ne pas l'écouter — surtout que tout ce qu'a sorti l'artiste n'est pas si exceptionnel que ça à mes oreilles !
8 de Prince of Denmark, donc, c'est trois heures de techno minimale, louvoyante, parfois ambient, avec une palette de couleurs toujours en demi-teintes. Un disque qui, même dans les passages les plus rythmés, suit parfaitement l'idée de l'ambient selon Eno : une musique aussi intéressante que non-intrusive. Ça n'a pas l'air franchement excitant, dit comme ça : il n'y en a pas des pelletées, des albums du genre ? … Et pourtant non. C'est sur la longueur qu'on se rend vraiment compte des qualités de ce disque : à force de se dire à tous les moments « OK, c'est classique, mais ce passage-là est vraiment pas mal ! », on finit par tout écouter — et par se rendre compte que l'ensemble est inouï. 8 couvre un terrain étonnamment vaste et passe par une gamme de styles et de phases (ma préférée étant la dernière, plus ambient, mélodique et crépusculaire) telle qu'on a l'impression d'un compendium, d'un hommage total au genre. Les pistes ont toujours quelque chose d'ambigu : reposantes ou entraînantes, mélancoliques ou intenses, classiques ou mystérieuses, froides ou touchantes… On finit par avoir un disque qui, plutôt que de nous imposer un programme, nous guide sans en avoir l'air et donne beaucoup sans qu'on s'en rende forcément compte.
Détail intéressant : il existe plusieurs versions de 8, avec des mixes différents des mêmes pistes, ou même des pistes complètement différentes qui partagent simplement le même nom. Ces différences n'étaient pas communiquées à l'avance, les acheteurs ont reçu l'une ou l'autre version au hasard. « Vous ne pourrez jamais tout avoir », annonçait Giegling. En tout cas, on a là le meilleur disque de Prince of Denmark (alias Traumprinz, alias DJ Metatron) que j'ai pu écouter.
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Crone Music de Pauline Oliveros est à l'origine la bande son d'une représentation de King Lear. C'est un disque solo d'accordéon, joué avec modulations, superpositions, portamenti* et réverbérations — on a l'impression d'entendre plusieurs instruments, ou plutôt le même instrument qui se reflète dans des miroirs sonores et ne se retrouve plus mais continue de se chercher. C'est très beau, et ça colle superbement au souvenir que j'ai de la pièce : à la fois pathétique et solennel, on passe de la mélancolie à la dissonnance, puis à la vraie noirceur.
Si vous n'aimez pas trop les accordéons, je vous conseille de l'écouter quand même, vous pourriez changer d'avis.
* Pitch bending si vous préférez. J'ai pas plus français que l'italien.
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Je n'avais pas beaucoup accroché à Persona de Puce Mary, un disque industriel / power electronics / dark ambient qui me donnait l'impression d'être trop classique, trop direct, d'avoir déjà entendu ces rythmes sourds, bruits et miasmes dissonants ailleurs.
The Spiral, par contre… Ça m'étonne que le descriptif officiel l'annonce comme la continuité de Persona, tant il me fait meilleure impression ! On reste dans les mêmes registres, mais avec nettement plus de profondeur. Malgré les martèlements brutaux et le noir crasseux omniprésents, il y a quelque chose d'insaisissable dans ce disque. Des tensions toujours irrésolues, des sons aigus aussi stridents que lumineux en contraste avec les nappes noires, des constructions nettes mais difficiles à mémoriser, une impression d'entendre le fracas de quelque chose de monstrueux qui s'approche, qui encercle, qui frappe, sans jamais le voir. (Seule piste réellement directe, la quasi-chuchotée “Enter Into Them”, au centre du labyrinthe.)
Il y a une grande violence là-dedans, mais c'est beaucoup moins monotone que les artistes qui veulent que tous leurs sons soient brutaux et qui se mettent à hurler et à saturer de partout. Il n'y a aucun ridicule ni excès ici. Juste de la férocité, de la perversité calculée et du paradoxe.
C'est un disque qui me donne envie d'y revenir autant pour les sons que pour tenter de mieux le cerner. J'aime bien les disques qui font ça.
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“Mirage” de Skirt est une piste magnifique toute en clair-obscur, une lueur diffuse au milieu des ténèbres, rythmée mais surtout avec une atmosphère parfaite. Sur l'EP éponyme, on trouve aussi “Skin”, qui joue d'une manière similaire avec le chaud et le froid, un rythme qui semble être sur le point d'accélérer ou de ralentir et reste en équilibre ainsi ; “Spessartine”, plus sombre, ressemble un peu à ce qu'a fait Demdike Stare sur Elemental. Le disque se termine sur un remix de la piste titre, pas aussi bon que l'original mais un bonus agréable tout de même. Tout ça donne donc un très bon EP, sorti chez Trolldans (dont toutes les sorties ont de jolies illustrations, dommage qu'ils superposent leurs titres dessus comme ça !).
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Un album de bruit relaxant, ça existe. Du moins selon une définition large du bruit. Soit par exemple Hedge of Nerves de Loren Chasse : 33 minutes de craquements de vieux vinyles, de vent qui souffle dans les branches (l'artiste précise même qu'il s'agit de branches de genévriers et de trembles), de feu qui crépite et de bruits de vagues combinés pour former une forme sonore atonale, arythmique, sans forme mais très naturelle. L'artiste rajoute quelques mélodies ambient en arrière-plan, discrètes la plupart du temps, absentes sur la troisième piste, nettement plus présentes sur la quatrième.