
Il y a quatre compositions en tout ; “Évocation” (dont le sujet, d'après le livret, est le temps et la mémoire) et “Faux-Jumeaux” confrontent jeux et reprises samplées de la même composition (une idée que j'avais déjà entendue ailleurs, notamment sur Nonextraneous Sounds de Mariel Roberts que j'aime beaucoup aussi). “Le Sentiment de la Nature aux Buttes-Chaumont”, inspiré par Le Paysan de Paris de Louis Aragon, comporte beaucoup de phonographies, ce qui est inattendu mais n'entame en rien la cohérence du disque.
Si ça vous tente, c'est un très beau disque ! J'en ai entendu parler ici : http://tzadikology.blogspot.fr/2014/05/pierre-yves-mace-faux-jumeaux.html
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À noter en passant — ça me fait bizarre de préciser ça — que l'artiste n'était pas que chanteuse, elle a écrit toutes ses chansons et s'est mise à la production aussi dès le disque suivant. Et pour l'anecdote, elle fut mariée à Miles Davis (c'est elle sur la pochette de Filles de Kilimanjaro) mais ça ne dura pas un an, Miles la trouvant trop jeune et trop impétueuse pour lui.
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The Sacrilege of Fatal Arms est une piste-collage de 80 minutes de rock expérimental progressif symphonique gothique à personnalités multiples (rien qu'à voir la liste des genres à rallonge sur RYM, je me suis dit « il me faut ce truc »), un disque qui enchaîne tant de tensions et dénouements explosifs qu'on dirait la bande son de plusieurs films simultanés*, chantée en latin, anglais, allemand et français ; l'œuvre d'un mystérieux « Mr. Doctor », un Slovène Italien qui a recruté les membres de son projet Devil Doll sous l'annonce suivante : « Plus un homme est dominé par la raison, moins il a de chances d'atteindre la grandeur ; rares dans la plupart des domaines, et inexistants dans celui de l'art, sont ceux qui réussissent sans être dominés par l'illusion. » Ça va, il a le sens de la mise en scène, le mec !
Et il a du talent aussi. The Sacrilege of Fatal Arms, c'est un album d'artifices avant tout, ça sent la poudre aux yeux, parfois ça frise le ridicule… mais pour peu qu'on accroche, c'est quand même franchement bon.
Cela dit, j'ai écouté un autre disque du même projet, Dies Irae, et c'était sensiblement la même chose — ce qui m'a paru très décevant. Quand deux tours de magie reposent sur le même truc, le deuxième impressionne beaucoup moins. Je reste donc sur The Sacrilege of Fatal Arms.
* Il s'agit bien d'une bande originale, d'ailleurs ; d'un film du même nom, et écrit et réalisé par Mr. Doctor lui-même, bien sûr.
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Présenté comme un « cauchemar », un « exorcisme » et un « opéra électronique » — industriel serait plus exact, vraiment, l'album n'est qu'en partie électronique —, Spears Into Hooks a des influences qui vont du power electronics au klezmer, des passages qui peuvent faire penser à Swans ou à Diamanda Galás, on ne sait jamais où l'artiste nous emmène. Neuf pistes et autant, si ce n'est davantage, de styles. “Weekend Away Break” avec sa rengaine d'avant-guerre donne la nausée. “Me Last Granny” avec sa voix presque seule est terrifiant.
Il s'agit aussi d'un album à thème politique, sur Israël dans les années 1990. Ça se traduit par de la tension, de la rancœur et de la violence partout. C'est un cauchemar polymorphe, captivant, je pensais l'écouter juste une fois pour voir mais j'y retourne plus souvent que je ne l'aurais imaginé.
https://meiraasher.bandcamp.com/album/spears-into-hooks-2
http://www.crammed.be/index.php?id=37&rel_id=129
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Les répétitions, très présentes, ne pèsent jamais. Et moi qui ai toujours trouvé le gros album d'ambient house (The Orb's Adventures Beyond the Ultraworld) décevant, trop long, avec des passages lourdingues… je dois dire que je lui préfère nettement cette alternative.
Leur album précédent était plus électronique, je ne l'ai pas beaucoup écouté encore. Je n'ai pas encore écouté le suivant, sorti dix ans après, paraît qu'il ressemble à Animal Collective (je ne sais pas encore si c'est une bonne chose).
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