vendredi 15 février 2019

Divinités / religions

Ça m'étonne toujours un peu de me rendre compte que la majorité des êtres humains, malgré des cultures très différentes, sont croyants. Pourquoi cette idée, pourtant complexe et loin d'être évidente, est-elle si répandue ? Avons-nous un manque « naturel » que comble la croyance ? Même si l'athéisme a pu être plus répandu dans le passé qu'on ne pourrait le croire, reste que le pourcentage des croyants dans le monde est… autour de 90 % grosso modo.

Il y a des hypothèses intéressantes qui expliqueraient la présence de la religion au sein de l'évolution de l'espèce humaine ; par exemple, supposer un agent (plutôt que le hasard) derrière chaque événement serait un trait avantageux pour la survie. Pascal Boyer, quant à lui, explique que la religion émerge de manière tout à fait naturelle si l'on considère les manières dont les humains pensent en général… et souligne le fait que la religion n'est pas n'importe quoi, ni un simple « sommeil de la raison ». (Je résume ça très grossièrement.) Je ne sais pas si ces hypothèses sont étayées ou s'il ne s'agit que de pistes.

Mais qu'est-ce que ça veut dire au juste, croire en Dieu ?

Le concept me paraît loin d'être évident. Notre univers est-il éternel et en changement perpétuel, a-t-il une origine précise, ou y a-t-il d'autres possibilités ? (Les deux premières me paraissent improbables, je n'ai aucune idée de ce à quoi une troisième pourrait ressembler.) Imaginer qu'une entité — au sens le plus large possible — ait pu créer notre univers ne me paraît pas déraisonnable en tout cas. Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est probable, je n'en sais rien. Mais ça se laisse envisager.

De là à considérer que cette entité soit (a) vivante, (b) consciente, (c) omnisciente, (d) omnipotente, (e) bonne si ce n'est infiniment bonne, (f) à l'image de l'être humain, (g) masculine, (h) à notre écoute, (i) qui contrôle nos êtres qui (j) sont en réalité des « âmes » immatérielles et (k) éternelles et (l) qu'il faut prier pour Lui même si personne ne L'a jamais vu à part des mystiques dont les témoignages paraissent impossibles et … (m n o p etc.) bref, tout ça, ça me paraît tellement injustifié et improbable que ça tient de la folie. (Rien que les trois premiers points sont incompatibles entre eux ou avec la réalité telle qu'on la connaît, quoi qu'en dise Leibniz. Des philosophes croyants ont bien essayé de réconcilier cela avec des « théodicées » mais je n'en ai vu aucune qui me convainque.)

En fait, il me paraît faussé de parler de « croire en Dieu » ou pas. Le pari de Pascal par exemple ne tient pas la route, c'est un faux dilemme — on pourrait tout aussi bien imaginer une entité qui punirait toute personne croyante. Ou une infinité d'autres possibilités.

J'aime bien la conception de Spinoza, qui considère (en très gros, je résume au bulldozer encore une fois) que Dieu serait la nature même. C'est la seule conception de Dieu que j'ai lue qui me paraît sensée. Et c'est peut-être aussi la seule hypothèse d'un monde avec des divinités qui ne soit pas glaçante ! Pour moi, c'est absolument horrible de penser qu'on puisse être sous la coupe d'une entité éternelle qui peut faire ce qu'elle veut de nous, je n'y vois aucun réconfort. Et je me demande d'ailleurs combien de personnes croyantes n'ont pas, au fond d'elles-mêmes, peur de Dieu. Le mot “God-fearing” est utilisé en anglais en tout cas, pour désigner quelqu'un de très croyant. Peut-être y a-t-il aujourd'hui de la peur et de l'amour mêlés, en plus d'autres choses ? Je m'y connais trop peu pour dire.

Sinon, les histoires de mythologies, en général c'est trop dérangeant pour moi. Mais à choisir, je préfère un peu le polythéisme au monothéisme, et je ne vois pas en quoi l'un serait plus probable que l'autre.

D'après une citation de Stuart Chase : « Pour qui a la foi, aucune preuve n'est nécessaire ; pour qui ne l'a pas, aucune preuve n'est possible. »

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